Agora des Colibris : intégrer la diversité sociale dans les projets collectifs ruraux
Intégrer la diversité sociale dans les collectifs : encore un défi !
L’Agora des Colibris est un cycle de réflexion entrepris depuis 2020 sur les nouvelles formes d’installation en milieu rural, dont l’Avise est partenaire.
Parmi ces « nouvelles » formes d’installation, on retrouve de nombreux citoyens aspirant à se réunir autour d’un projet de vie collective, écologique et solidaire. C’est notamment le cas des collectifs porteurs des projets Oasis, rassemblés récemment au sein de la coopérative Oasis impulsée par le Mouvement Colibris.
Cependant, la question de l’inclusivité de ces projets collectifs est souvent posée : comment mieux intégrer une diversité de personnes, de profils ou encore de parcours au sein des collectifs ? C’est la question que souhaitaient poser les organisateurs aux deux intervenants, le Village Emmaüs Lescar Pau et L’Arche le Caillou Blanc, venus éclairer la problématique par leurs retours d’expérience sur le fonctionnement des communautés auxquelles ils appartiennent.
Le Village Emmaüs Lescar Pau
Premier témoin, Germain Sarthy, fondateur du Village Emmaüs Lescar Pau. Fondé il y a 30 ans, le village accueille aujourd’hui plus d’une centaine de compagnons, des volontaires, des bénévoles et des salariés.
L’accueil au sein du Village est inconditionnel : toute personne qui arrive se voit offrir une collation, visite le village, puis si elle souhaite y rester, obtient une chambre et la possibilité de participer à l’activité. Aucune question n’est posée sur le passé des personnes, qui, en situation de fragilité sociale et psychique, se reconstruisent en devenant actrices du projet du village. Les compagnons peuvent rester le temps qu’ils souhaitent. En plus d’une prise en charge complète, ils reçoivent une allocation et cotisent pour la retraite, permise par le statut d’Organisme d’accueil communautaire d’action sociale (OACAS) du Village.
Aux côtés des compagnons, Germain mentionne la présence de nombreux bénévoles, notamment des retraités qui peuvent venir de 3 à 6 mois, mais aussi la venue de plus en plus de volontaires, jeunes, qui demandent parfois le statut de compagnon. Ces jeunes, dit-il, s’interrogent sur leur choix de vie, et sont intéressés tant par la dimension sociale que par la dimension écologique du village.
L’inclusion par la gouvernance et l’activité économique
Au fil des échanges, deux facteurs complémentaires ressortent des propos de Germain sur le caractère inclusif de la communauté : la gouvernance participative, et l’intégration à la vie économique du Village et du territoire.
Premièrement, la gouvernance participative et horizontale permet à chacun de participer aux réunions : les décisions sont « prises dans l’instant et non en instances ».
Deuxièmement, le Village a développé de nombreuses activités économiques au sein desquelles les compagnons travaillent en fonction de leurs capacités : déchetterie, recyclerie, crêperie, bar, restaurant, fournil, ferme biologique et épicerie bio et locale qui vend les produits des agriculteurs voisins et de la ferme.
L’intégration des compagnons passe également par la reconnaissance et l’intégration du Village dans la région en tant qu’acteur économique, social, écologique et culturel. Afin de favoriser cette ouverture au territoire, le Village organise des événements, conférences, concerts, etc. Cette reconnaissance permet d’après lui « une meilleure intégration des personnes dans la Cité » : 50 personnes ont ainsi par exemple une carte d’électeur et votent.
L’Arche Le Caillou Blanc
Deuxième témoin, Bruno Vandenberghe, responsable de L’Arche le Caillou blanc, établissement de l’économie sociale et solidaire (ESS) du médico-social sous tutelle de l’Agence régionale de santé et du Conseil départemental, qui accueille une quarantaine de personnes en situation de handicap mental.
Comme l’explique Bruno, l’Arche du Caillou blanc a plusieurs dimensions, et notamment :
- Une dimension professionnelle, en tant qu’établissement d’accueil médico-social et sur un volet artisanal avec la mise en place d’ateliers (menuiserie-ébénisterie, espaces verts, ESAT etc.) ;
- Une dimension communautaire, puisque la vie est partagée au sein de foyers de 5 à 7 personnes, et au sein des ateliers ;
- Une dimension d’ouverture, avec l’accueil de volontaires en service civique et une résidence d’accueil temporaire.
En dehors des 40 personnes en situation de handicap, la communauté intègre en effet une quarantaine de salariés, une dizaine de volontaires en service civique et une trentaine de bénévoles actifs.
Pour Bruno, l’inclusion n’est pas un concept mais une expérience vécue. Egalement facilitée par une gouvernance partagée, des réunions hebdomadaires et un projet commun écrit tous les quatre ans, elle repose avant tout sur la vie partagée en communauté. Il conclut ainsi : « Je crois à la réinsertion affective avant la réinsertion professionnelle. Chacun doit participer aux activités en fonction de ses capacités physiques et morales ».
>> Revoir les différents webinaires organisés par le Mouvement Colibris