Construire une feuille de route pour mon territoire
Les feuilles de route ESS, des plans d’action essentiels
Lorsqu’une collectivité souhaite agir en faveur de l’économie sociale et solidaire (ESS) et engager une démarche politique ciblée, elle peut construire et communiquer une feuille de route. Cette dernière formalise les grandes orientations stratégiques dans un document central, qui a pour objectif de faciliter la mise en œuvre d’actions effectives et de les articuler avec cohérence.
Il existe une diversité de formats possibles. Y figurent le plus souvent :
- un rappel de la démarche engagée par la collectivité, de son contexte et de son fondement, lié au rôle transverse de l’ESS sur ses domaines de compétences ;
- un panorama du contexte territorial et une présentation synthétique des enjeux identifiés lors diagnostic préalablement mené ;
- une présentation synthétique du plan d’action, de sa méthodologie, des axes identifiés, de leurs objectifs et des modalités de mise en œuvre.
Ce document offre aux acteurs du territoire un référentiel des outils et des leviers que la collectivité souhaite actionner. Il formalise ainsi une vision à moyen terme des ambitions des politiques menées en faveur de l’ESS. Il est donc important de ne pas négliger la complexité de l’exercice et de soigner chacune des grandes étapes préconisées.
Étape indispensable : mener en amont un diagnostic territorial. En effet, ce dernier permet de mettre en évidence et de constater, par des chiffres clés et des analyses comparatives, les secteurs à potentiels, les enjeux saillants et les besoins non couverts.
Un diagnostic peut combiner les méthodes quantitatives et qualitatives. Il permet d’affiner l’analyse en partant d’enquêtes de terrain et/ou d’entretiens poussés avec des acteurs locaux (acteurs de l’ESS, de l’économie classique, collectivités, citoyens…) et mettre en exergue des dimensions non mesurables (ex : niveau d’acculturation à cette forme d’économie) et de confirmer ou d’apporter des nuances aux résultats chiffrés.
Le diagnostic est un avant tout un état des lieux sensible, qui doit prendre en compte l’ensemble des dynamiques territoriales, y compris les coopérations entre les différents acteurs locaux. Il est en effet important d’inclure une présentation des acteurs de l’écosystème présents sur le territoire, leur complémentarité et les zones géographiques peu ou non couvertes. Quels types d’entreprises retrouve-t-on ? Quels statuts juridiques ? quels secteurs d’activité ? Y a-t-il des structures accompagnatrices ou des réseaux agissant sur le territoire ? Quelles offres proposent-ils (accompagnement, financement…) ?
Lors du diagnostic préalable, divers acteurs (entreprises de l’ESS, accompagnateurs et réseaux, acteurs de l’économie classique, collectivités, citoyens...) ont dû être sollicités pour construire un panorama complet du territoire.
Afin que les constats soient considérés comme légitimes et servent de base de travail pour construire la feuille de route, ils doivent être partagés et reconnus. Pour mener cette démarche de façon neutre, il est nécessaire de faire appel à des acteurs tiers et d’utiliser un cadre méthodologique bien défini et solide. Mais, au-delà de ces considérations, il est préférable de penser la construction de sa feuille de route comme une démarche collective (une co-construction).
La collectivité peut alors organiser plusieurs temps forts pour associer les acteurs concernés :
- une restitution publique du diagnostic et une présentation de la démarche ;
- des ateliers de concertation (partages d’expérience, besoins émanant des acteurs, idées…) ;
- un questionnaire ;
- si nécessaire, des entretiens individuels complémentaires à ceux menés lors du diagnostic, afin de recueillir les recommandations des acteurs ;
- une restitution de ces temps forts de concertation.
La région Normandie a ainsi proposé un questionnaire en ligne et des temps d’échanges collectifs pour établir son diagnostic sur l’ESS en Normandie (ateliers territoriaux, webinaires thématiques, conférence régionale de l’ESS pour partager la restitution lors d’un temps fort). De même, Nantes Métropole a mobilisé plus de 300 acteurs lors de 32 ateliers de travail dans l’écriture de sa feuille de route à horizon 2026.
Afin de décliner les axes et les orientations prioritaires en action effective, il faut penser à :
- prendre en compte des thématiques et secteurs à potentiel (développement d’activités économiques et sociales employeuses) ;
- définir les modalités de mise en œuvre des objectifs fixés (nouveaux dispositifs financiers nécessaires, actions et évènements à planifier).
Plus la feuille de route est détaillée et bien articulée, plus elle est lisible pour les acteurs. Il sera alors aisé de la mettre en œuvre. Pour cela, quelques bonnes pratiques à intégrer :
- produire un tableau récapitulatif de l’articulation entre axes, objectifs et actions ;
- prévoir le pilotage et l’animation de la stratégie ;
- prévoir la mise à jour de la feuille de route et l’évaluation de la stratégie.
Zoom sur la stratégie régionale de l'ESS en Nouvelle-Aquitaine
Élaborée en collaboration avec la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (CRESS) en concertation avec les réseaux de l’ESS du territoire, la stratégie régionale de l’ESS (Sress) en Nouvelle-Aquitaine est complémentaire au schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII). Les deux sont des feuilles de route en faveur du développement de l’ESS. La SRESS concerne le développement de l’ESS dans son sens le plus large. Le SRDEII, quant à lui, concerne le développement économique des entreprises de l’ESS relevant du secteur marchand.
Pour définir cette stratégie, les acteurs de l’ESS ont été concertés lors de l’assemblée générale de la Cress et lors des 14 ateliers départementaux organisés ensuite. Un questionnaire en ligne a permis de recueillir des contributions libres. Enfin, un travail de consolidation et d’analyse des contributions et des ateliers a été mené.
La SRESS repose sur trois défis, chacun décliné en priorité et mis en relation avec les constats du diagnostic mené et la vision partagée socle. Chaque priorité est également déclinée en orientations, qui comprennent des leviers d’intervention.
Se faire accompagner
Pour bénéficier de l’expertise et de la posture neutre d’un acteur tiers, il est préférable de se faire accompagner lors de la construction de la feuille de route.
En premier lieu, il peut être pertinent de se tourner vers les Chambres régionales de l’ESS (CRESS), partenaires naturels et privilégiés eu égard à leur connaissance fine du maillage territorial à l’échelle de la région et aux enjeux saillants. Ainsi, le Conseil départemental du Lot-et-Garonne s’est appuyé sur la Cress pour établir l’état des lieux de l’ESS sur le département - notamment sur son observatoire - et a mobilisé ses adhérents pour recueillir leur point de vue.
Toujours dans le même objectif, les structures locales de l’accompagnement et autres réseaux locaux peuvent également mettre à disposition leur expertise et leur connaissance du territoire. En effet, ils disposent d’outils dédiés et d’une méthodologie appliquée au quotidien lors de leurs accompagnements. Par exemple, en 2021, les Ecossolies ont appuyé Nantes Métropole dans la définition de sa feuille de route ESS, notamment sur le volet concertation.