L’écosystème de l’insertion par l’activité économique (IAE)
Un contexte global de refonte des dispositifs d’insertion et d’accompagnement vers l’emploi
En 2023, l’insertion par l’activité économique s’inscrit dans le cadre de deux démarches majeures au niveau national : le Service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE) et France Travail.
Parmi ses engagements, la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté (2018) portait l’ambition que l’État soit « garant du service public de l’insertion afin de garantir sur tout le territoire un accompagnement adapté pour tous ». Suite à cette annonce, le Service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE) a été mis en place progressivement dans des territoires d’expérimentation. Son objectif est que chaque personne faisant face à des difficultés d’accès à l’emploi puisse bénéficier d’un parcours d’accompagnement personnalisé, adapté et coordonné entre les différents intervenants. En février 2022, 80 % du territoire national était engagé dans cette démarche.
Dans certains territoires, les structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE) ont été particulièrement mobilisées. Par exemple, dans le Nord, un des trois axes du projet local du SPIE visait à améliorer la transition vers le secteur marchand des personnes en parcours d’insertion.
Pour contribuer à l’objectif d’atteindre le plein emploi, le chantier France Travail a été lancé en septembre 2022. France Travail est voué à remplacer Pôle Emploi. Ce nouvel opérateur devra, selon la Mission de préfiguration France travail, constituer une « porte d’entrée pour l'ensemble des personnes en recherche d'emploi, ensemblier opérationnel et animateur de l’offre de services d’un réseau d'acteurs complémentaires, responsable devant l’État et les collectivités territoriales ». L’objectif est de dévoiler le potentiel d’emploi de la France et de permettre à chacun d’y accéder.
Les SIAE sont identifiées comme des partenaires de France Travail. Le projet France Travail étant encore en cours de construction à date, des précisions sur la place des SIAE au sein de cette démarche sont attendues lors des prochaines phases du chantier.
Le rôle envisagé pour l’IAE dans France Travail suscite à date d’importants questionnements de la part des acteurs de l’IAE.
Pour en savoir plus, consultez les analyses réalisées par :
- la Fédération des acteurs de la solidarité (avril 2023) ;
- le réseau Coorace (juillet 2023).
Le pilotage stratégique de l’insertion par l’activité économique (IAE)
Le pilotage stratégique de l'IAE est réalisé au niveau national et au niveau local.
Au niveau national
Au sein du Gouvernement, le ministère du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion est chargé des orientations stratégiques au sujet de l’IAE. Celles-ci sont publiées chaque année au sein de la circulaire de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) relative au Fonds d’inclusion dans l’emploi (FIE).
Pour en savoir plus sur les orientations actuelles définies pour l’IAE, consultez la circulaire du 7 avril 2023 relative au Fonds d’inclusion dans l’emploi.
Ces dernières années, le ministère a mobilisé différents acteurs pour réaliser une analyse stratégique de l’IAE et proposer des pistes de solution face aux enjeux identifiés :
- le Conseil de l’inclusion dans l’emploi (CIE). Créée en 2018 pour cinq ans, cette instance avait pour mission de jouer un rôle actif dans le développement de politiques publiques d’inclusion dans l’emploi au sens large. Elle comptait vingt-trois membres : représentants d’administrations, de l’écosystème de l’inclusion, d’entreprises engagées, de la recherche, etc. À partir de janvier 2019, le CIE a mené un travail de concertation avec les parties prenantes de l’IAE : structures, réseaux, DGEFP, directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS), Pôle emploi, etc. Cette démarche a abouti à la réalisation du Pacte d’ambition pour l’IAE, rendu public en septembre 2019. Ce document formule une proposition de feuille de route visant à créer 100 000 emplois supplémentaires en insertion d’ici la fin 2022.
- l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS). En 2022, le ministère du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion a mandaté ce service pour réaliser une mission d’évaluation de la situation de l’IAE. Cette mission devait donner lieu en particulier à une analyse des caractéristiques des publics accueillis, de la qualité des parcours, du mode de financement, des partenariats avec les entreprises « conventionnelles », de la gouvernance et du pilotage de l’IAE. Le rapport L’insertion par l’activité économique : état des lieux et perspectives a été rendu public en janvier 2023.
Pour représenter les intérêts des SIAE et accompagner ces structures au quotidien, plusieurs réseaux nationaux mènent des actions auprès de l’écosystème de l’insertion.
Au niveau local, certains de ces réseaux sont présents dans les territoires via des délégations régionales.
Il existe également des inter-réseaux de l’IAE. Dans certaines régions, ils regroupent des représentants de plusieurs délégations locales de réseaux nationaux de l’IAE.
A partir de février 2023, neuf réseaux nationaux de l’IAE se sont constitués en un collectif national. Ce collectif a publié une contribution commune en mars 2023, suite à la parution du rapport de l’IGAS. Il propose une méthode et des thématiques de travail pour coconstruire une nouvelle feuille de route pour l’IAE avec les pouvoirs publics.
Les réseaux de l’IAE sont mobilisés par le ministère du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion pour coconstruire cette nouvelle feuille de route en 2023, avec d’autres acteurs de l’écosystème.
>> Pour en savoir plus, consultez l'article « Les réseaux de l'IAE »
Au niveau local
Les conseils départementaux de l’insertion par l’activité économique (CDIAE) ont été institués en 1998 par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
Leurs missions sont :
- de donner des avis sur les demandes de conventionnement IAE et sur les candidatures au Fonds de développement de l’inclusion (FDI) local ;
- de réaliser un plan d’action pour promouvoir l’IAE sur le territoire, en cohérence avec les autres dispositifs en faveur de l’insertion.
Les CDIAE sont pilotés par les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS). Ils regroupent des représentants :
- de l’État ;
- des collectivités territoriales ;
- de Pôle emploi ;
- de l’IAE ;
- des organisations professionnelles et interprofessionnelles d'employeurs ;
- des organisations syndicales représentatives des salariés.
Dans son rapport L’insertion par l’activité économique : état des lieux et perspectives, l’IGAS souligne que dans les faits, les CDIAE ne seraient pas suffisamment tournés vers la conception d’une stratégie territoriale pour l’IAE, bien que cette mission doive constituer un axe essentiel de leurs actions. Le rapport indique que les CDIAE seraient principalement centrés sur des enjeux de gestion administrative et financière.
Pour impulser une nouvelle dynamique aux CDIAE, le rapport propose que la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) recommande l’édiction de schémas départementaux de promotion territoriale et sectorielle de l’IAE.
En 2019, le Pacte d’ambition pour l’IAE proposait de remplacer les CDIAE ainsi que les comités techniques d’animation (CTA) par d’autres instances de pilotage territorial : comités régionaux de l’inclusion dans l’emploi et comités territoriaux de l’inclusion dans l’emploi.
Les comités techniques d’animation (CTA) ont pour missions de suivre les parcours d’insertion de façon globale et d’assurer la mise en œuvre opérationnelle des dispositifs de l’IAE. Pilotés par Pôle emploi, les CTA réunissent les prescripteurs, les représentants des SIAE, les DDETS et d’autres acteurs pertinents du territoire.
Dans son rapport L’insertion par l’activité économique : état des lieux et perspectives, l’IGAS souligne que dans les faits, le CTA tel qu’il est mis en œuvre répond de façon variable aux besoins des acteurs, selon les territoires. Il peut en effet constituer un « [v]éritable instrument de suivi des parcours individuels » ou se limiter à « des réunions d’information descendantes portant sur l’offre de service de Pôle emploi » ou encore demeurer en sommeil suite à l’interruption des réunions en raison de la crise sanitaire.
Pôle emploi a indiqué son souhait de ne plus piloter les CTA en 2023. L’IGAS recommande au contraire que Pôle emploi conserve ce pilotage, au vu de son rôle dans l’accompagnement individuel des demandeurs d’emploi.
En 2019, le Pacte d’ambition pour l’IAE proposait de créer des comités régionaux de l’inclusion dans l’emploi. Dans la lignée de cette vision, la circulaire de la DGEFP du 7 avril 2023 relative au Fonds d’inclusion dans l’emploi incite les services déconcentrés à mettre en place des comités de pilotage régionaux de l’IAE.
Les partenaires opérationnels locaux de l’insertion par l’activité économique (IAE)
La DDETS, un partenaire incontournable
Les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) sont des partenaires essentiels de l’IAE dans les territoires.
Dans ce cadre, elles ont quatre missions principales.
- Elles instruisent les demandes de conventionnement des SIAE de leur territoire.
- Elles mènent l’entretien de bilan annuel des actions, appelé « dialogue de gestion », avec chaque SIAE de leur territoire.
- Dans le cadre du processus de conventionnement et des dialogues de gestion, elles définissent le montant de l’aide au poste dont bénéficiera chaque SIAE du territoire. Ce montant est calculé sur la base du nombre de postes en insertion dans la SIAE (défini également par la DDETS à partir de la demande de la SIAE) et des efforts ainsi que des résultats de la SIAE en matière d’accès à l’emploi et à la formation au regard des caractéristiques des salariés en insertion. Au cours de l’année, les DDETS peuvent être amenées à ajuster les moyens financiers alloués aux structures de leur territoire. L’IGAS indique que ces ajustements se produisent trois à quatre fois par an.
- Elles contribuent au pilotage local de l’IAE puisqu’elles pilotent les conseils départementaux de l’IAE (CDIAE), participent aux comités techniques d’animation (CTA) et mettent en œuvre les circulaires relatives au Fonds d’inclusion dans l’emploi, avec les directions régionales de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS).
Dans son rapport L’insertion par l’activité économique : état des lieux et perspectives, l’IGAS indique que le processus de conventionnement représente une charge administrative conséquente et « sans valeur ajoutée » pour les DDETS. L’IGAS relève également que le dialogue de gestion demeure la plupart du temps « une procédure très administrative » qui ne permettrait pas d’échanger de façon approfondie sur le modèle économique de la SIAE ni sur les parcours d’insertion.
L’IGAS recommande donc :
- de dématérialiser et simplifier le processus de conventionnement des SIAE ;
- d’expérimenter la conclusion d’annexes financières pluriannuelles ;
- de redynamiser les dialogues de gestion en autorisant la tenue de dialogues différenciés (approfondi et annuel ou allégé et biannuel) selon les caractéristiques de la SIAE.
De multiples partenaires locaux
Les SIAE ont tout intérêt à travailler en coopération avec les acteurs du territoire qui peuvent favoriser l’insertion et l’accès à l’emploi durable localement.
La liste ci-dessous (non exhaustive) présente les partenaires auxquels les SIAE peuvent faire appel selon leurs besoins.
- Pour identifier et recruter les personnes éloignées de l’emploi sur le territoire : les prescripteurs habilités (par exemple Pôle emploi, CAP Emploi, les missions locales, les caisses d'allocations familiales, les caisses de la Mutualité sociale agricole…) et les orienteurs (qui peuvent orienter des personnes vers un parcours d’insertion mais ne peuvent pas valider leur éligibilité).
- Pour avoir accès à des financements : le conseil départemental notamment pour le soutien à l’insertion des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), les collectivités de façon générale selon les opportunités (comme des appels à projets locaux), France Active, le Fonds social européen (FSE), les fondations et des acteurs spécifiques selon les secteurs d’activité (par exemple l’ADEME pour les projets liés à la transition écologique).
- Pour favoriser la résolution de freins d’ordre social des personnes en parcours d’insertion : par exemple Mob’In pour les difficultés de mobilité, Action logement pour les enjeux d’accès au logement, etc.
- Pour favoriser l’accès à la formation des salariés en parcours : les opérateurs de compétences (OPCO), les SIAE agréées en tant qu’organismes de formation, etc. Sur ce point, voir par exemple le guide Les étapes clés du parcours de formation professionnelle dans l’Insertion par l’Activité Economique (IAE) réalisé par la DREETS Hauts-de-France.
- Pour construire un parcours d’insertion cohérent et adapté : les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ), les dispositifs adaptés aux personnes en situation de grande précarité comme « Premières heures en chantier » ou « TAPAJ, travail alternatif payé à la journée ».
- Pour favoriser l’accès à l’emploi durable : la communauté Les entreprises s’engagent, le programme SEVE Emploi développé par la Fédération des acteurs de la solidarité, la démarche Vita Air proposée par Coorace, les entreprises à but d’emploi (EBE) du dispositif Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD), etc.
- Pour bénéficier d’un accompagnement (par exemple sur son modèle économique ou son organisation) : les réseaux de l’IAE, le DLA (le dispositif local d’accompagnement de l’ESS), les structures d’accompagnement à l’émergence ainsi qu’à l’accélération, etc.