Autriche : une économie sociale en filigrane
Dans cet Etat fédéral, les Länder jouent un rôle politique central. Les institutions qui s’y rattachent, l’équivalent de nos conseils régionaux, sont des interlocuteurs incontournables du fait de leurs compétences notamment en matière d’économie et d’emploi.
« On utilise les termes d’économie sociale, mais le plus souvent, les organisations se rattachent à leur thématique spécifique comme les services sociaux, la politique de l’emploi, l’insertion des handicapés etc. », explique Judith Püringher, directrice générale de la fédération autrichienne des entreprises sociales (BDV - Bundesdachverband für Soziale Unternehmen). _ Cette fédération regroupe 200 structures orientées sur l’insertion par l’activité économique et le travail adapté. Le dialogue avec les collectivités, tout comme avec l’Etat central passe donc par la tutelle désignée par son utilité sociale.
Des Länder chefs de file
Les Länder ont notamment en charge le développement économique, l’aménagement du territoire et l’emploi tandis que la santé et l’éducation relèvent de l’Etat fédéral. Sur le champ de l’emploi, la coopération avec l’économie sociale est structurée via les Pactes territoriaux pour l’emploi (TEP). Les TEP, dont la mise en œuvre est soutenue par le Fonds social européen, visent à organiser la concertation de l’ensemble des parties prenantes (collectivités, entreprises, administrations, syndicats, ONG et entreprises sociales) afin d’élaborer les politiques portées par le gouvernement et l’assemblée régionale. Chaque Land est maître du contenu du Pacte et les ONG et entreprises sociales sont généralement intégrées à la concertation. Mais la nature des TEP est de « coordonner les différents acteurs sur le champ de l’emploi et d’essayer de parvenir à une approche intégrée », explique Judith Pürinhger. Le BDV et d’autres organisations ont d’ailleurs milité pour une intégration de plein droit de leurs représentants en tant qu’économie sociale, au sein des TEP dans le cadre des négociations sur la programmation 2014-2020 du FSE. La fédération des entreprises sociales est d’ailleurs structurée en fédérations régionales qui « travaillent déjà en lien avec les autorités régionales et les services de l’emploi », constate la directrice générale.
Des villes impliquées
Les autres niveaux de collectivités peuvent être impliqués sur certains champs de notre économie sociale et solidaire. Ainsi, le commerce équitable trouve un écho favorable, avec une quarantaine de villes reconnues comme « Territoire de commerce équitable » par l’équivalent autrichien de notre Fairtrade Max Havelaar. Cela signifie qu’ils ont atteint un certain niveau d’engagement tant sur le plan du soutien aux organisations que des achats publics en produits équitables.
A l’instar de l’Allemagne, les collectivités s’engagent sur le développement des monnaies complémentaires. Dans le Voralberg, Land au Nord du pays, le Talent (Talentiert), une monnaie sociale est notamment acceptée par certaines communes pour régler jusqu’à 75 % de ses impôts locaux. Cette monnaie (100 talents = un heure de services), n’est utilisée que par 0,5 % de la population régionale, mais 50 % des habitants la connaissent. Le règlement des taxes et impôts locaux en monnaie sociale est expérimenté depuis 2011 dans trois districts. L’enjeu est de stimuler la circulation. Cette monnaie pourrait être utilisée par les collectivités pour financer certaines activités d’associations et autres structures d’utilité sociale.
Philippe Chibani-Jacquot
Pour aller plus loin :
BDV - Bundesdachverband für Soziale Unternehmen
Judith Püringher, directrice générale
Tél. : +43-1-236 76 11, courriel : judith.puehringer@bdv.at
Site web : www.bdv.at
Talente Rolf Schilling, coordinateur régional
Tél. : +43 664-63 66 161, courriel : r.schilling@talente.cc
Site web : www.talente.cc
Cet article a été réalisé en partenariat avec l'Association des Régions de France et la Caisse des Dépôts.