Enjeux et opportunités du numérique pour les entreprises de l’ESS
L'Avise partenaire du Social Good Accelerator
Lauriane Barthélémy : Depuis 2002, l’Avise accompagne le développement de l’Économie sociale et solidaire (ESS) et de l’innovation sociale en France en travaillant avec des institutions publiques et des organisations privées pour apporter des réponses aux porteurs de projet et structurer un écosystème favorable au développement de ces derniers.
Dans le cadre de sa mission d’intérêt général, l’Avise s’intéresse aux actualités de la tech et à l’évolution des besoins numériques des structures de l’ESS. Le principal enjeu semble aujourd’hui d’informer, de sensibiliser et d’acculturer les acteurs de l’ESS, mais également les acteurs tech, aux avantages de coopérations renforcées et au cadre dans lequel ces dernières pourraient avoir lieu.
Quels enjeux et opportunités du numérique et de la tech pour les entreprises de l’ESS ?
L. B : En tant qu’agence d’ingénierie, nous avons une approche généraliste du développement de l’ESS et nous parlons plus largement de numérique plutôt que de tech. Quand, nous avons commencé à nous intéresser à cette thématique, nous avons d’abord analysé la façon dont les enjeux numériques évoluent dans l’ESS puis les usages et pratiques développés par les entreprises d’utilité sociales en matière de numérique.
Nous avons constaté qu’il existe deux principaux enjeux. Le premier concerne la transition numérique, et plus particulièrement l’outillage, la connaissance et l’utilisation du numérique par des structures souvent associatives et de petite taille. Le second enjeu est la transformation numérique qui positionne le numérique comme levier d’innovation sociale. Un grand nombre de structures de l’ESS s’acculturent aujourd’hui au numérique et à la tech, pour autant, toutes n’ont pas vocation ou ne sont pas prêtes à s’engager dans des logiques de coopération ou même d’innovation. À l’Avise, nous cherchons ainsi à identifier les tendances de la transformation numérique, à accompagner l’acculturation des entreprises de l’ESS et à explorer des pistes de collaboration avec les acteurs de la tech.
Quelles coopérations identifiez-vous entre les acteurs de l’ESS et de la tech ?
L. B : À l’Avise, nous voyons émerger depuis quelques temps des entrepreneurs sociaux qui croisent innovations sociale et technologique pour répondre à des problématiques sociales et sectorielles spécifiques.
Le secteur du handicap est un bon exemple, je pense par exemple aux projets de Hello!Tiger qui propose des objets technologiques (sonnette sans fil et boîte de commande d’appareils électriques à distance), simples à utiliser et adaptables aux différents handicaps. Dans un autre secteur, Reconnect utilise le cloud et les nouvelles technologies de l’Internet afin d’améliorer l’inclusion sociale au moyen d’un coffre-fort numérique pouvant conserver les documents administratifs numérisés de personnes en situation de précarité. Ces deux projets illustrent parfaitement l’avantage de s’appuyer sur la tech dans des dynamiques d’innovation sociale.
L’un des principaux enjeux de l’ESS dans l’exploration de ces coopérations avec la tech est de décloisonner son écosystème et de s’ouvrir à d’autres modes de fonctionnement. Cette observation vaut également pour le secteur de la tech dont les acteurs connaissent en général très mal les spécificités de l’univers de l’ESS et du fonctionnement des structures.
Ainsi, même si les structures de l’ESS commencent à inclure la tech dans leur démarche d’innovation sociale, une démarche de sensibilisation demeure cruciale pour les acteurs de la tech afin que la rencontre puisse se faire.
Quels sont selon vous les leviers et freins de ces coopérations ?
L. B : Le levier principal passe avant tout par le « faire ensemble ». Des organisations comme l’Avise ou bien des réseaux d’accompagnateurs sont utiles pour donner l’impulsion à un niveau national afin que davantage d'actions soient menées en local. C’est indéniablement via les
structures de l’accompagnement qu’il faut initier les ponts entre ces univers très différents.
Des initiatives sont par exemple à imaginer du côté des « makers » et des « fablabs ». Ces structures étant plus proches du secteur associatif, le pas à franchir des deux côtés serait peut-être moins important pour une première approche partenariale. Les incubateurs et les coworking sont également des espaces à exploiter pour permettre de travailler ensemble. Nous pourrions ainsi imaginer qu’un incubateur de projets sociaux et qu’un incubateur de projets tech collaborent pour permettre la rencontre des entrepreneurs qu’ils accompagnent.
Quelles actions en lien avec la tech menez-vous auprès de structures de l’utilité sociale ?
L. B : Nos actions sur le numérique et la tech sont traitées de manière transversales dans nos différents programmes. Nous avons notamment publié un dossier thématique ESS et Numérique, disponible sur notre centre de ressource www.avise.org. Dans chacune de nos équipes, une personne est référente sur ces questions qui infusent l’ensemble de notre activité et nous nous appuyons d’ailleurs sur les travaux du Social Good Accelerator (SOGA) pour nous alimenter et enrichir nos pratiques.
Par exemple, afin de répondre aux premiers besoins d’accès et de formation au numérique des entreprises de l’ESS, avant-même de penser à l’utilisation des nouvelles technologies, dans le cadre du Dispositif local d’accompagnement (DLA) dont l’Avise est l’animateur national, nous travaillons avec des structures comme HelloAsso ou OpenAsso.
Au sein de notre pôle « Emergence » nous accompagnons la création d’entreprises d’utilité sociale en animant notamment la Communauté émergence & accélération, rassemblant plus de 80 acteurs et 130 dispositifs de l’accompagnement à l’entrepreneuriat social au niveau national. Cette communauté est un espace de partage d’information et d’expériences et les enjeux et opportunités du numérique et de la tech sont régulièrement abordés au sein d’ateliers. À l’avenir, nous envisageons également de mettre en place des rencontres entre acteurs de l’ESS et acteurs du numérique et de la tech pour travailler notamment sur la problématique de l’acculturation.
Quelles perspectives émergent selon vous ?
L. B : Notre connaissance et nos collaborations avec des acteurs de la Tech à l’Avise vont continuer de croître. Il serait, par exemple, possible d’imaginer des parcours communs pour des entrepreneurs ou encore des interventions de structures de la Tech dans des programmes dédiés
à l’entrepreneuriat social. Mais encore une fois, le résultat de ces rencontres et actions sera d’abord conditionné par la sensibilisation et l’acculturation de l'ensemble des acteurs !
>> Retrouvez l'intégralité de l'étude Coopérations entre les acteurs de l'utilité sociale et de la tech en Europe, publiée par le Social Good Accelerator en partenariat avec l'Avise
>> Découvrez le dossier ESS et numérique publié par l'Avise