Incubateur d’innovation sociale et CAE : un partenariat au service de la création d’entreprises de l’ESS
Les partenaires en bref
La coopérative d’activités et d’emploi (CAE) Prisme, travaille pour accompagner des entrepreneurs individuels à développer leur activité en leur permettant de rester dans la coopérative en tant qu’entrepreneur-salarié. C’est ce statut qui leur permet de tester et lancer leur activité dans un cadre juridique sécurisé. En tant que coopérative, Prisme est adhérente à l’Union régionale des Scop et Scic Auvergne Rhône Alpes (URSCOP).
Porté par l’URSCOP, Alter’Incub Auvergne-Rhône-Alpes est un incubateur régional d’innovation sociale, membre du réseau du même nom présent en Centre Val-de-Loire et en Occitanie. Sa mission est de favoriser et accompagner l’émergence de projets à forte dimension collective et qui répondent à des besoins sociaux identifiés sur le territoire. Ainsi, « des liens étroits existaient déjà entre Alter’Incub et Prisme », explique Camille Dière.
Les deux structures sont membres de la Communauté Emergence & Accélération.
Construire un partenariat opérationnel à petits pas
Comment a été initiée votre coopération ?
« Le cœur de métier de la CAE Prisme est l’accompagnement d’activités individuelles, mais nos entrepreneurs cherchent à faire des choses ensemble. Ils travaillent beaucoup en collectif, on avait la volonté d’accompagner aussi ce type d’initiatives », répond Julien Marty.
Le but de Prisme n’étant pas de créer un dispositif à part, en 2018 ils se sont rapprochés d’Alter’Incub pour organiser une journée d’information à Montélimar (ville du siège de Prisme). Pendant cette journée, Alter’Incub a présenté la structure et ses programmes d’accompagnement collectifs aux différents partenaires de la coopérative.
Un an plus tard, en 2019, la CAE Prisme a souhaité candidater à l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) Fabriques de Territoires afin de créer un tiers-lieu qui soit un espace ressource pour le territoire et ses habitants. Dans ce cadre, la coopérative a repris contact avec Alter’Incub pour mettre en place un partenariat autour de l’AMI, pour accompagner des projets collectifs dans des territoires ruraux dans la Drôme et en Ardèche. Ce partenariat est devenu opérationnel en septembre 2020 après la labellisation Fabriques de Territoires.
Pourquoi et comment travaillez-vous ensemble ?
« Le programme d’accompagnement d’Alter’Incub propose des journées collectives d’accompagnement tous les mois à Lyon, mais ce n’est pas forcément accessible à des porteurs de projet éloignés de cette ville… On voulait avoir des programmes plus accessibles », explique Camille Dière.
Ce partenariat est le résultat d’une ambition d’agir pour le territoire, en offrant un accompagnement accessible pour les porteurs de projet éloignés des grandes métropoles. Camille Dière et Julien Marty travaillent en binôme pour accompagner des projets collectifs, avec un modèle économique hybride, une dimension d’ancrage territorial et répondant à un besoin social ou environnemental.
Julien précise : « On a des manières de faire différentes mais des points communs. Notre travail consiste à tester et à être attentifs aux ajustements à faire. Par exemple, l’accompagnement durait 12 mois au début, mais on s’est rendus compte que c’était trop court pour nos porteurs de projet. Aujourd’hui on est sur 15 mois. »
Des formations collectives sont organisées dans les locaux de la CAE Prisme à Montélimar, plus central pour les porteurs de projet, mais également dans d’autres espaces inspirants et ancrés dans le territoire comme certains tiers-lieux. Pour ces ateliers, des formateurs issus de la Vallée du Rhône sont mobilisés afin de ne pas « déraciner les projets ». Aussi, Camille et Julien accompagnent individuellement trois projets, soit six au total par saison. Ont par exemple été accompagnés des tiers-lieux, des garages solidaires, des projets sur le bien-vieillir, une association qui travaille pour l’accueil et l’insertion des personnes réfugiées, etc.
Apports et enseignements du partenariat
La plus-value de cette coopération pour le territoire et ses habitants
Pour Julien, cette coopération dans l’accompagnement favorisent le décloisonnement : « les porteurs de projets, dans le cadre de leur développement, vont aller parler à des acteurs qui parfois ne se parlent pas ». Pour imager son propos, il propose une métaphore originale : « avoir des porteurs de projets sur son territoire, c’est comme avoir des vers de terre dans sa terre. Ça crée de la respiration, des discussions et au final, une terre fertile [pour innover]. C’est très positif pour les territoires. »
« Les porteurs de projets vont voir les acteurs du territoire pour mieux comprendre la problématique et le besoin social auxquels ils veulent répondre : cela nourrit les échanges et encourage les coopérations entre eux par la suite », continue Camille Dière.
Autre effet de cette coopération entre l’incubateur et la coopérative : le nombre de candidatures de potentiels porteurs de projet a augmenté. Cela montre que ces territoires, ruraux, attirent de plus en plus de candidats, ou bien que des aspirations entrepreneuriales se révèlent parmi les populations déjà présentes.
De même, le programme d’accompagnement partagé mobilise et stimule les ressources locales. Par exemple, les formations sont majoritairement dispensées par des acteurs du territoire, ce qui crée de l’activité voire de l’emploi. De même, et de façon non négligeable, les projets accompagnés créent des activités et dynamiques économiques et des emplois locaux non délocalisables en apportant des solutions à des besoins sociaux et environnementaux.
Enfin, la plupart des personnes accompagnées montent en compétences et peuvent pour certaines gagner en confiance en soi et en capacités entrepreneuriales, car l’accompagnement est aussi bien technique (sur la modélisation économique et juridique du projet) qu’humain. Ainsi, même si le projet ne se réalise pas, elles peuvent plus facilement valoriser ces acquis sur le marché du travail.
Quelles perspectives pour cette coopération ?
Aujourd’hui, les équipes et le programme sont opérationnels. Ayant l’ambition de pérenniser le partenariat, la CAE Prisme et Alter’Incub sont à la recherche d’un partenaire financier.
Deux conseils pour travailler en partenariat
- Camille Dière : « Il faut se laisser du temps pour se connaître. C’est important de connaître l’autre structure, l’équipe, le territoire et ses acteurs. »
- Julien Marty : « Il faut prendre le temps de clarifier les attentes dans les partenariats. Être transparent avec l’autre structure, ne pas avoir d’« attente secrète » et être au clair avec les ressources à disposition font la différence. »