Le monde associatif : quel paysage pour demain ?
Dresser un état des lieux du secteur associatif français
Réalisée en partenariat avec l'Association pour le développement des données sur l'économie sociale (ADDES) et la Fondation crédit coopératif, l’enquête « Le paysage associatif français – Mesures et évolutions » propose un état des lieux du secteur associatif français et fait émerger les grandes tendances du secteur associatif : secteurs d’activité, emploi salarié, financement, gouvernance, bénévolat.
Les acteurs associatifs et ceux qui les accompagnent ont depuis quelques années, observé de profondes mutations de leur modèle économique ainsi que de la structure des financements : la raréfaction des subventions publiques, l’incitation à développer des activités génératrices de revenus, la centralisation… Ces observations partielles sont toujours difficilement traduisibles en grandes tendances générales. La vaste étude réalisée par Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau est dans ce sens importante puisqu’elle compare des données récoltées depuis 2011. Le portrait du monde associatif actuel qu’elle présente vient confirmer les intuitions et poser des chiffres essentiels au plaidoyer. Car il s’agit bien, au travers de ce travail, de défendre le modèle associatif français et, à travers lui, la société civile qui s’y implique.
Les 4 grandes tendances du paysage associatif
1- Le poids économique du secteur
Le secteur associatif tant à s’imposer dans notre paysage économique. D’une part, le budget total du monde associatif représente 113.3 milliards d’euros, soit 3,3% du PIB. D’autre part, le nombre d’associations estimées vivantes est passées de 1 300 000 en 2011 à 1 500 000 en 2017, soit une augmentation de 2,4%. Enfin du côté salarié, les 1 758 500 emplois associatifs en 2017 sont en augmentation de 2,4% par rapport à 2011.
2- Le dynamisme de la société civile et sa représentation
Le dynamisme de la société civile est illustré par une augmentation à la fois du nombre de bénévoles et du nombre d’heures de bénévolat effectuées. En d’autres termes, entre 2011 et 2017, les bénévoles s’investissent davantage (+4,9 % par an) et sont plus nombreux (+4,5 % par an). Les associations ont donc bénéficié de 31 272 000 participations représentant un volume de travail bénévole de l’ordre de 1 425 000 emplois en temps plein.
Cependant, le profil des dirigeants bénévoles est lui, peu représentatif de cette mobilisation. En effet, les femmes ne représentent que 36 % des président.e.s d’association en 2017 et les CSP les moins favorisés tels que les ouvriers, 5%. Enfin, le poids élevé et croissant des seniors est un constat mesuré par l’étude : les personnes âgées de plus de 65 ans représentaient 32 % des président.e.s associatifs en 2011, contre 41 % en 2017.
3- La diminution de la subvention publique et la nécessité d’hybridation du modèle économique
La diminution de la subvention publique et l’incitation à l’hybridation des ressources bouleversent la structure du modèle associatif. D’une part, on observe un glissement de la subvention publique vers la commande publique. Les subventions publiques ont diminué de 34 % à 20 % tandis que le poids de la commande publique est passée de 17 % à 24 %. D’autre part, l’hybridation des modèles s’explique aussi par la diminution des ressources publiques au profit des ressources privées. Dans la période récente, pour la première fois, les ressources publiques ont baissé de 0,2 % tandis que les ressources privées ont augmenté de 3,2 %.
Les associations vivent principalement et de façon croissante de ressources liées à leurs activités puisqu’elles représentent 66 % de leurs ressources en 2017 contre 49 % en 2011. Les financements privés sont en forte croissance et désormais majoritaires dans les budgets associatifs. Les dons et mécénat représentent environ 5 % des ressources du financement du secteur associatif, les autres ressources proviennent des usagers (32 % en 2005 contre 42 % en 2017). La part de plus en plus importante des usagers dans les budgets indique une monétarisation progressive du service associatif.
Cette évolution n’est pas neutre. La marchandisation des activités des associations a un impact sur les missions des associations et sur leur capacité d’innovation des associations qui repose principalement sur la subvention publique.
4- La disparition des associations moyennes
On observe une concentration croissante des budgets associatifs dans les grandes associations puisqu’elles sont les plus en mesure de répondre aux commandes publiques.
Les petites associations quant à elles, augmentent en nombre, mais leur poids économique est limité.
Enfin, on constate une disparition des associations moyennes dont le nombre est en baisse constante : -4,1% par an, depuis 2011. Pourtant, ces acteurs intermédiaires sont essentiels sur les territoires.
Que retenir de ces évolutions ?
Certaines évolutions sont constantes : poursuite de la transformation des financements publics, privatisation croissante et rapide des ressources s’appuyant sur la participation des usagers, développement du nombre de petites associations sans salariés, baisse des associations moyennes…
Cependant, de nouvelles tendances apparaissent : la baisse du financement public marque une rupture importante, le poids du secteur jusqu’à l’heure en perpétuelle croissance se stabilise et les mouvements de concentration s’affirment.
Ces constats témoignent du fait que malgré un dynamisme de la société civile, les valeurs du secteur associatif sont mises à mal et remise en cause dans leurs capacités à innover et à rester centrées sur leur mission première : celui de répondre à l'intérêt général.
>> Pour aller plus loin, découvrez la synthèse de l'enquête « Le paysage associatif français ».