L'Ecole de projets et la formation EVEIL, pour former à l'ESS en Ardèche
L’Ecole de projets : une réponse partenariale à des opportunités de développement économique et aux besoins d’accompagnement sur le territoire
Sur le territoire Sud Ardèche, la réflexion autour de la création d’une Ecole de projets est née en 2013, au moment où était étudiée l’inscription de la Grotte Chauvet-Pont d’Arc sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Des acteurs locaux tels que la Maison de l’Emploi et de la Formation se sont intéressés au potentiel d’activités économiques nouvelles que pouvait générer cet événement, en particulier via la diversification des activités touristiques autour de prestations culturelles.
La réflexion s’est notamment portée sur le croisement de ces opportunités économiques avec la création d’activités dans l’ESS, le territoire de l’Ardèche bénéficiant d’une dynamique positive de l’ESS qui représente près de 16% de l’emploi salarié du département (Insee CLAP 2015).
En 2013, l’association Amesud a été contactée par la Maison de l’Emploi et de la Formation pour mener une étude de faisabilité sur l’implantation d’une Ecole de projets EVEIL*, dispositif qui existait déjà en Bretagne avec le projet Interstices porté par l’association Steredenn entre 2001 et 2016.
Trois constats et besoins sont ressortis de l’étude :
- S’il existait déjà des dispositifs d’accueils individuels pour les projets formalisés, un manque persistait sur l’accueil de porteurs de projets au stade de l’idée, ou de l’envie (premiers pas).
- Pas de connaissance et de positionnement spécifique ESS parmi les acteurs et dispositifs d’aide à la création d’activité du territoire.
- Pas d’accompagnement de projets collectifs.
Dans le cadre de ses actions de sensibilisation et d’accompagnement 1er conseil, Amesud a constaté trois besoins principaux chez les porteurs de projets :
- Monter en compétence sur la méthodologie et la gestion de projet (gestion financière, comptable, communication, etc.).
- Acquérir une meilleure connaissance du territoire et de l’écosystème local
- S’intégrer dans une dynamique collective avec des perspectives d’échanges, pour éviter un sentiment d’isolement du porteur de projet.
L’objectif initial de l'Ecole : accompagner les premiers pas à l'ESS de manière collective
Grâce aux financements Conseil départemental de l’Ardèche dans le cadre de son Programme d’investissement d’avenir (PIA) en faveur de la jeunesse, Amesud, Le Mat 07 et les coopératives Pollen Scop et Natura Scop (à l’époque réunies dans le réseau ITESS pour porter des coopératives d’activité éphémère) ont pu mettre en œuvre l’Ecole de Projets à partir de 2017, initialement tournée vers l’accompagnement des jeunes. Un co-financement LEADER a notamment permis d’élargir la cible des bénéficiaires du projet pour y intégrer les personnes en réorientation professionnelle.
Lancée en février 2018, la première promotion de l’Ecole de projets a accueilli une douzaine de candidats accompagnés durant 4 mois, avec un programme en 3 phases :
1/Des apports de connaissances sur l’ESS, l’innovation sociale et le développement durable
2/L’étude et la compréhension du territoire (caractéristiques, besoins et opportunités) dans l’optique d’encourager la création d’activités nouvelles et complémentaires par rapport à celles déjà existantes.
A l’issue de ces deux phases, les candidats présentent leurs projets à un comité de partenaires locaux pour évaluer la pertinence du projet avant d’initier :
3/L’étude de faisabilité des projets en vue de leur formalisation (statuts ; gestion financière, études de marché, etc.).
Un parcours d’accompagnement qui met l’accent sur l’ancrage sur le territoire et l’intégration à l’écosystème local
Au cours de cette démarche, plusieurs modalités d’accompagnement visent à favoriser l’intégration des porteurs de projets et de leurs activités dans l’écosystème local :
- La réalisation de stages en immersion auprès d’entrepreneurs sociaux ou de structures associatives : ces stages (2 x 1 semaines) permettent aux candidats de mettre en situation voire de confronter leur envie d’entreprendre à la réalité de l’entrepreneuriat, et d’échanger avec les acteurs locaux sur le volet technique des projets (financement, état du marché, aspect métier, compétences nécessaires…).
- La mobilisation d’un réseau d’une trentaine de structures de l’ESS (associations, Scop, Scic, entrepreneurs salariés en CAE…) ainsi que des intervenants experts (Initiactive 2607, ISDPAM, la NEF, l’ADIE, etc.) lors de formation collective et de retours d’expérience.
- L’organisation de rencontres au sein des structures ESS locales, en invitant les structures partenaires et les anciens stagiaires pour travailler autour d’une problématique (comme en décembre 2019 sur la transmission des projets au Vieil Audon par exemple).
L’Ecole de projets a rapidement gagné en visibilité sur le territoire et Amesud a pu établir des contacts avec de nombreuses structures ESS. A ce jour, environ 35 structures qui sont venues témoigner et/ou ont accueilli des stagiaires en semaine d’immersion ou en visite.
En automne 2018, la deuxième promotion de l'Ecole de projets a été lancée avec un format plus court, axé sur la phase de formalisation des projets. L'accompagnement était ouvert aux candidats dont les projets étaient parfois hors du champ de l'ESS, mais qui développaient leur propre cheminement personnel et ne nécessitaient pas les deux premières phases. « Cela a leur a permis de mettre des mots sur leurs projets. Certaines personnes ont découvert un monde. Sur les 10 porteurs de projets, 2 n’avaient jamais entendu parler de l’ESS et ont rejoint Pollen Scop par exemple. C’est très intéressant en termes de dynamique de groupe ».
De la posture d'accompagnateur à celle de formateur : la mise en œuvre d’une certification professionnelle « Entrepreneur de l’Economie Solidaire et du Développement Durable »
En 2018, afin de pérenniser les financements et pour que la démarche initiée via l’Ecole s’inscrive dans la durée, le comité de pilotage oriente le projet vers le secteur de la formation professionnelle.
Amesud prend alors contact avec la Scic Kejal qui propose une certification professionnelle « Entrepreneur de l’Economie Solidaire et du Développement Durable » (lire l’interview d’Adeline Le Mabec, formatrice-accompagnatrice au sein de la Scic).
Après avoir acté le fait de proposer la formation, un nouveau format est testé pour développer l’Ecole de projets abordant la création d’activité ESS sous l’angle de la formation jusqu’en 2019. « On a basculé progressivement d’une posture d’accompagnement de porteurs de projets – pour la réalisation - à une posture de formateur pour l’acquisition de compétence dans la mise en œuvre de projets entrepreneuriaux. Les participants ont l’impression d’être co-acteurs du programme car leur retours critiques sont pris en compte, en s’inspirant des méthodes de l’éducation populaire ».
En juillet 2019, Amesud a continué à se former avec la Scic Kejal pour que la promotion suivante soit présentée comme une formation visant l’acquisition compétences (en conservant l’appellation EVEIL, reconnue localement). La certification est de niveau bac+2, ouverte à tous et sans niveau de diplôme prérequis. A l’automne 2019, 16 candidats ont ainsi été sélectionnés pour une première phase d’initiation de 6 semaines sur tous les modules de formation, suivie de la rédaction d’un pré-projet présenté à l’oral par tous les stagiaires et qui détermine leur continuation en formation professionnalisante ou non (les 16 ont été acceptés). Débutée en janvier 2020, cette première promotion devrait être certifiée en juillet.
Quel intérêt pour l’entrepreneur qui suit ce parcours de formation ?
L’intérêt de cette formation est triple :
- Valider un diplôme.
- Avoir accès à la formation en milieu rural (pour les personnes dont le fait de se former en ville implique des problématiques de mobilité et de coûts).
- Acquérir des compétences entrepreneuriales.
Des réflexions sont en cours pour maintenir et développer cette démarche, en particulier :
- La mise en oeuvre d'un parcours non-continu pour des entrepreneurs qui aimeraient faire reconnaitre leur compétence d’entrepreneurs, via la validation des acquis (VAE) par exemple.
- Rendre plus visible l'ensemble de cette démarche et son impact en renforçant la dynamique de réseau « post-EVEIL », entre les anciens stagiaires et les entrepreneurs en activité.
* EVEIL - Encourager Valoriser les Expérimentations et Initiatives Locales pour entreprendre autrement
> Plus d'informations sur le site d'Amesud
> En savoir plus sur l'ESS en milieu rural avec le projet Tressons