L’ESS est une opportunité pour l’économie circulaire… et vice versa !
ESS et économie circulaire à la croisée des stratégies régionales
C’est depuis 2009, avec le lancement par Antoine Rufenacht du Grenelle de l'Estuaire dans la Basse Seine, que la Normandie s’intéresse au concept d’économie circulaire. Hubert Dejean de la Bâtie, 12e Vice-Président de la région, en charge de l'environnement, évoque spontanément le lien entre économie circulaire et emploi : « Considéré par l’exécutif régional comme un levier important pour la création d’emplois, les politiques de transition énergétique et écologique sont pilotées depuis la direction générale en charge de l’économie, à l’instar du soutien aux entreprises et des mutations économiques […] ou encore de l’économie sociale et solidaire. »
Parce qu’elles détiennent à la fois des compétences dans l’économie, les déchets, l’environnement et l’emploi, les régions croisent de plus en plus leurs politiques d’économie sociale et solidaire et d’économie circulaire. C’est ainsi que dans son document de présentation budgétaire 2017 la Région Grand Est nomme un paragraphe « ESS et économie circulaire » et qu’on peut y lire une orientation qui affirme les croisements entre ces deux champs : « Dès 2017, nous mettrons l’accent sur l’économie circulaire, dont l’ESS est l’une principales actrices. ». Du côté de la Normandie c’est dans son SRDEII que la région fait ces croisements : dans son axe trois, l’objectif affiché est de « développer l’économie sociale et solidaire, notamment l’économie circulaire/collaborative comme source d’innovation et d’expérimentation ».
Favoriser les concertations d’acteurs autour de l’économie circulaire sans y oublier l’ESS
En Normandie, témoigne Hubert Dejean de la Bâtie, « une gouvernance partenariale de l’économie circulaire en région a été mise en place en octobre 2016. Elle repose sur une interaction forte entre le Comité régional de l’économie circulaire (regroupant Région, État et ADEME) et les multiples clubs et réseaux d’acteurs existants sur l’ensemble des thématiques de l’économie circulaire. […] L’objectif est de répondre aux besoins fortement exprimés de transversalité, de recherche de synergies et de mutualisations entre les réseaux. »
Pour Julia Obrebski, Chargée de mission Économie Circulaire à la CRESS Normandie et qui participe à cette dynamique « les acteurs de l’ESS sont reconnus comme acteurs importants de cet écosystème. […] Il y a eu 8 mois de travail collaboratif avec les acteurs des filières, associations environnementales, fédérations professionnelles et territoires, auquel la CRESS a participé ».
Les concertations permettent la construction de cadres d’actions, c’est pourquoi l’implication des acteurs de l’ESS y est importante. Les CRESS, les réseaux de l’insertion, ceux de l’éducation à la nature – tous sont des acteurs mobilisables dans ces concertations.
Encourager les dynamiques territoriales autour de l’économie circulaire : l’ESS regorge de bonnes pratiques
Du point de vue de l’économie circulaire le besoin de croisement est une évidence. Pour économiser, réutiliser, recycler, les acteurs d’un territoire ont besoin de faire connaissance et d’interagir au-delà des « silos » traditionnels.
Les dynamiques de coopération territoriale, l’ESS en a fait sa spécialité. Prenant le contre-pied d’une culture de la compétition, le labo de l’ESS a lancé la démarche des Pole Territoriaux de coopération économie (PTCE). Véritable outil de structuration des coopérations territoriales, plusieurs de ces pôles se sont spécialisés dans des thématiques ayant trait à la gestion locale des déchets. Cette culture de la coopération territoriale initiée par des acteurs de l’ESS reçoit de plus en plus de soutien des collectivités, notamment quand cela croise les enjeux d’économie circulaire. Ainsi, par exemple, quand la Région Grand Est lance un appel à manifestation d’intérêt « initiatives territoriales » à destination des structures de l’ESS. Le texte de l’appel précise parmi les projets cibles « la structuration de filières locales créatrices d’activités/services non délocalisables : recyclage, économie circulaire, énergie […]. »
La coopération territoriale, c’est aussi la création de réseau. En Corse, Yannick Léger, Délégué Général de la CRESS, estime par exemple que « d’un point de vue opérationnel, une des mesures les plus importante est sans aucun doute le lancement d’un appel à projet pour la mise en place d’un réseau de ressourcerie en Corse par l’ADEME et l’Office de l’Environnement. Cette initiative est particulièrement révélatrice de la logique partenariale où l’association de tous les acteurs a permis de faire émerger un besoin, concevoir une réponse structurante, dynamiser des initiatives locales et mettre en place un accompagnement des projets retenus. »
La construction des partenariats, des coopérations, des alliances, des filières sont plus que jamais à l’ordre du jour. Ces constructions sont des solutions pour le développement de l’économie circulaire et l’ESS peut y apporter ses expériences. Ces chemins, aussi nécessaires soit-ils, restent semés d’embûches. La possibilité de mobiliser des outils de financement ou de conseil constituent des facteurs de réussite de ces démarches.
Des appels à projet économie circulaire ouvert sur l’ESS, à qui il faut penser diffuser l’information !
Hubert Dejean de la Bâtie rapporte qu’en Normandie la région envisage de « réaliser des études et des audits préalables à des investissements dans le domaine de l’économie circulaire ou permettant l’émergence de dispositifs locaux. ». A la collectivité territoriale de Corse Michel-Patrick Battesti, Chef du département Prévention et Gestion des Impacts Anthropiques évoque le « lancement en cours d’un Plan d’actions en faveur de l’économie circulaire ».
Souvent les appels à projet économie circulaire sont ouverts aux acteurs de l’ESS. C’est le cas par exemple dans l’appel à projet que la Région Centre-Val de Loire, l’Etat et l’ADEME ont lancé de manière conjointe. Dès la première page du règlement, l’éligibilité des structures de l’ESS y est annoncée. Il y est même précisé qu’« outre les bénéfices écologiques, cette activité émergente [l’économie circulaire] est créatrice de richesses et d’emplois non délocalisables (y compris via l’ESS). »
Si les appels à projet économie circulaire des Régions ou de l’ADEME sont généralement ouverts aux structures de l’ESS encore faut-il que celles-ci soient au courant. Veiller à ce que de tels appels soit diffusés dans les réseaux de l’ESS et que des relais existent pour les renseigner est essentiel.
Marie Bohner